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La bataille de la Mer de Corail (1942)
Article mis en ligne le 3 mai 2017
dernière modification le 1er mai 2021

par Nghia NGUYEN

Aux portes de l’Australie : les forces en présence

Au printemps 1942, l’Empire japonais atteint la limite maximale de son extension territoriale dans le Pacifique. Depuis décembre 1941, une succession de victoires a balayé les Français, les Britanniques, les Néerlandais, et met les Américains sur la défensive dans un espace maritime immense. Les Japonais sont désormais aux portes de l’Australie, le dernier grand allié régional de Washington. Pour le Japon, la bataille qui s’ouvre au début du mois de mai 1942 a pour objectif d’isoler l’Australie tout en consolidant la pointe méridionale de son expansion par la prise de deux sites portuaires d’importance : Port-Moresby en Nouvelle-Guinée et Tulagu dans l’archipel des Salomon.

Deux forces d’invasion sont ainsi mises sur pied dont la protection est assurée par une flotte articulée autour de 3 porte-avions : le Shokaku, le Zuikaku et le Shoho. Les deux premiers sont des porte-avions modernes de la même classe (32 000 tonnes). Le Shoho est, quant à lui, un bâtiment hybride conçu entre le pétrolier et le ravitailleur de sous-marins, et engagé dans la bataille comme porte-avions léger (14 200 tonnes). Conduite par le Vice-amiral Shigeyoshi INOUE, l’opération reçoit pour nom de code "Mo".

 

Le porte-avions léger Shoho (14 200 tonnes) sera coulé le 7 mai 1942

 

Ayant réussi à déterminer les objectifs de l’ennemi, les Américains anticipèrent l’offensive japonaise en envoyant, fin avril, 2 porte-avions dans la Mer de Corail : le USS Yorktown CV-5 et USS Lexington CV-2, tous deux placés sous le commandement du Contre-amiral Frank J. FLETCHER. Les USS Hornet et Enterprise ayant participé au raid du Lieutenant-colonel James H. DOOLITTLE sur Tokyo, ils devaient rejoindre la base de Pearl Harbor pour se ravitailler et ne purent participer à la bataille. L’US Navy n’engageait donc que 50% de ses porte-avions dans la Mer de Corail.

Trouver les porte-avions adverses

Si le 3 mai, la première force d’invasion japonaise parvint à prendre pied sur l’île de Tulagu, la bataille tourna d’emblée en une recherche des porte-avions ennemis. Pour les Américains, ces derniers étaient le moyen de détruire les flottes de débarquement qui approchaient de Tulagu et de Port-Moresby. À l’inverse pour les Japonais, la destruction des porte-avions américains sécuriserait les forces d’invasion tout en affaiblissant sensiblement la défense de l’Australie, quand bien même des bombardiers B-17 pouvaient encore frapper à partir des bases australiennes. Confirmer la présence des porte-avions ennemis (surtout pour les Japonais qui étaient moins bien renseignés), en déterminer le nombre, les localiser pour pouvoir ensuite les attaquer, tels étaient les objectifs tactiques de la bataille qui s’engagea à partir du 4 mai.

Ce jour-là, attaquant la flotte de débarquement à Tulagu, les avions du Yorktown coulèrent le destroyer Zikuzuki ainsi que 3 dragueurs de mines. Cependant le 7 mai, dans leur recherche des porte-avions américains, les avions japonais surprirent et frappèrent le pétrolier ravitailleur USS Neosho ainsi que le destroyer USS Sims qui l’accompagnait. Ce dernier sombra alors que le premier était abandonné (1). Cependant en fin de matinée, les groupes aériens conjoints de l’USS Yorktown et de l’USS Lexington parvinrent à débusquer le porte-avions Shoho qui fut à son tour bombardé, torpillé et coulé.

Cette présentation des combats ne doit pas masquer une journée de grande confusion dans les deux camps, où l’on vit des B-17 bombarder par erreur des bâtiments américains. L’immensité de l’espace à couvrir, la faiblesse des rayons d’action des appareils de l’époque ainsi que des systèmes de détection encore rudimentaires, expliquent en grande partie les ratés et les méprises (2).

Un combat au-delà de l’horizon

La confrontation était cependant montée d’un cran, et l’on comprit de part et d’autre que le choc des porte-avions n’était plus très loin. La nuit du 7 au 8 fut donc mise à profit pour préparer l’engagement du lendemain. Les task forces japonaise et américaine se repérèrent quasiment au même moment le 8 mai en début de matinée. Elles étaient distantes l’une de l’autre d’à peu près 400 km lorsqu’elles lancèrent leurs groupes aériens. C’est dans cet engagement que l’on put, pour la première fois, parler de bataille « au-delà de l’horizon », où les porte-avions se combattirent sans se voir et par aviation interposée : une révolution en matière de combat naval.

Au cours de cet affrontement le Shokaku fut gravement touché mais le Zuikaku échappa aux bombardements. En revanche, les deux porte-avions américains furent sévèrement touchés, surtout le USS Lexington dont les incendies, maîtrisés dans un premier temps, reprirent violemment à la suite d’une série d’explosions. Devenu incontrôlable, le Lexington fut abandonné, et torpillé par le destroyer USS Phelps.

Les deux adversaires rompirent le combat à l’issue de cette importante journée. Les pertes américaines avaient été sensibles, et il ne restait plus qu’un porte-avions au demeurant gravement endommagé. Qui plus est le ravitaillement sur zone était compromis avec la perte du pétrolier USS Neosho. Côté japonais, le Shokaku était lui aussi gravement avarié, et n’était plus en mesure de poursuivre le combat. Le Zuikaku demeurait intact, mais son groupe aérien avait été décimé. Il ne disposait plus d’avions ni de pilotes en nombre suffisant pour, à la fois, achever le USS Yorktown et assurer sa mission de protection des forces d’invasion.

Les Japonais restèrent donc maître du terrain, mais avec de grandes difficultés pour ravitailler leurs bâtiments et dans l’incapacité de relancer une nouvelle attaque aérienne. L’ordre fut donc donné de remettre à plus tard l’invasion de Port-Moresby. Le porte-avions Shokaku avait déjà quitté le champ de bataille pour regagner le Japon où des réparations lourdes l’attendaient. Le Zuikaku le suivit afin de reconstituer son groupe aérien. Ces deux grands bâtiments de la Marine impériale n’étaient donc plus opérationnels pour de longs mois.

Défaite tactique mais victoire stratégique pour l’US Navy

La bataille de la Mer de Corail est considérée comme une victoire tactique japonaise classique, si l’on considère le tonnage des bâtiments coulés de part et d’autre. La Marine américaine y a perdu les plus gros navires, notamment le USS Lexington CV-2 qui valait davantage que le Shoho (3). Ces gains tactiques n’étaient cependant qu’illusions. La bataille marqua un véritable coup d’arrêt à l’expansion japonaise dans le Pacifique Sud après des mois ininterrompus de victoires. Si les Japonais débarquèrent à Tulagu, ils s’y trouvèrent rapidement isolés alors que Port-Moresby n’était toujours pas en leurs mains. La Marine impériale battit donc en retraite et l’Australie fut sauvée. Stratégiquement, et nonobstant les pertes de l’US Navy, la bataille fut donc un échec pour le Japon.

La suite des événements allaient rapidement confirmer l’avantage pris par les Américains dans cette première confrontation aéronavale. Frappé par une bombe anti-blindage de 250 kg qui traversa 4 niveaux, endommagé également sous sa ligne de flottaison, le USS Yorktown fut dérouté sur Pearl Harbor où il fut réparé en un temps record de quelques jours seulement ! En dépit de ses graves dommages, il avait réussi à joindre les îles Tonga pour y subir les premières réparations. Le 20 mai – en prévision de la bataille imminente de Midway - il reçoit l’ordre d’appareiller pour rejoindre de toute urgence l’arsenal de Pearl Harbor, soit une distance de 7000 km qu’il va parcourir à une vitesse de 20 noeuds. Il y arrive le 27 pour être réparé en 3 jours.

Des marins mais aussi des pilotes…

L’épopée du USS Yorktown est plus qu’un exploit technique, déjà impressionnant en soi. Elle fut aussi un exploit stratégique, la Navy parvenant à redéployer en un mois un porte-avions que les Japonais pensaient avoir coulé… Remis en condition opérationnelle, embarquant un groupe aérien réarmé, le Yorktown appareilla le 30 mai en direction des îles Midway où convergeaient déjà les porte-avions USS Hornet et USS Enterprise.

Pour les Japonais, la bataille de la Mer de Corail avait été coûteuse en avions et - fait bien plus grave - en pilotes. Au cours de l’affrontement, ils perdirent 80 appareils contre 66 pour l’US Navy. Mais alors que les Américains s’efforçaient de récupérer leurs pilotes abattus en pleine mer, les pilotes japonais étaient abandonnés et quasiment tous sacrifiés. L’opération MO n’aboutit donc pas seulement à la neutralisation de 3 porte-avions japonais : elle fut aussi une hémorragie de pilotes expérimentés, ce qui n’allait pas manquer de peser dans les confrontations futures.

  1. Cf. Mortellement touché et à la dérive, le pétrolier Neosho sera achevé le 12 mai par le destroyer USS Henley.
  2. Cf. Les Américains disposaient déjà de radars opérationnels, notamment sur leurs deux porte-avions (radar CXAM de 160 km de portée). Les Japonais étaient, en revanche, en retard dans ce domaine, et ne disposèrent de radars que tardivement dans le conflit.
  3. Cf. Surnommé "Lady Lex", le USS Lexington était un porte-avions lourd de 50 000 tonnes. Son épave a été localisée le 4 mars 2018 par le milliardaire Paul G. ALLEN à 800 km à l’est de l’Australie par 3000 m de fond.

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Bibliographie

  • BERNARD (Nicolas), La guerre du Pacifique 1941-1945, Paris, Tallandier, 2016, 810 p.
  • WILLMOTT (Hedley Paul), Atlas des guerres. La Guerre du Pacifique 1941-1945, Éditions Autrement, 2001, 224 p.

 


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