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Le décolonialisme

« Le décolonialisme », une stratégie hégémonique : l’appel de 80 intellectuels", in Le Point, 28 novembre 2018.

Article mis en ligne le 2 décembre 2018
dernière modification le 12 novembre 2020

par Nghia NGUYEN

En quoi la "lutte contre le racisme" menée par une mouvance idéologique de gauche et d’extrême gauche n’est, en fait, que le nouveau visage du racisme contemporain ? Dans quelle mesure assiste-t-on à l’investissement des espaces intellectuels et culturels par ces mouvances et dans quel but ? Dans une lettre publiée par le journal Le Point, 80 personnalités venues d’un large horizon intellectuel répondent et lancent un cri d’alerte.

 

 

"C’est au rythme de plusieurs événements universitaires et culturels par mois que se multiplient les initiatives militantes portées par le mouvement « décolonial » et ses relais associatifs (1). Ces différents groupes sont accueillis dans les plus prestigieux établissements universitaires (2), salles de spectacle et musées (3). Ainsi en est-il, par exemple, du séminaire « Genre, nation et laïcité » accueilli par la Maison des sciences de l’homme début octobre, dont la présentation regorge de références racialistes : « colonialité du genre », « féminisme blanc », « racisation », « pouvoir racial genré » (comprendre : le pouvoir exercé par les « Blancs », de manière systématiquement et volontairement préjudiciable aux individus qu’ils appellent « racisés »).

Or, tout en se présentant comme progressistes (antiracistes, décolonisateurs, féministes…), ces mouvances se livrent depuis plusieurs années à un détournement des combats pour l’émancipation individuelle et la liberté, au profit d’objectifs qui leur sont opposés et qui attaquent frontalement l’universalisme républicain : racialisme, différentialisme, ségrégationnisme (selon la couleur de la peau, le sexe, la pratique religieuse). Ils vont ainsi jusqu’à invoquer le féminisme pour légitimer le port du voile, la laïcité pour légitimer leurs revendications religieuses et l’universalisme pour légitimer le communautarisme. Enfin, ils dénoncent, contre toute évidence, le « racisme d’Etat » qui sévirait en France : un Etat auquel ils demandent en même temps - et dont d’ailleurs ils obtiennent - bienveillance et soutien financier par le biais de subventions publiques.

La stratégie des militants combattants « décoloniaux » et de leurs relais complaisants consiste à faire passer leur idéologie pour vérité scientifique et à discréditer leurs opposants en les taxant de racisme et d’islamophobie. D’où leur refus fréquent de tout débat contradictoire, et même sa diabolisation. D’où, également, l’utilisation de méthodes relevant d’un terrorisme intellectuel qui rappelle ce que le stalinisme avait naguère fait subir aux intellectuels européens les plus clairvoyants.

C’est ainsi qu’après les tentatives d’ostracisation d’historiens (Olivier Pétré-Grenouilleau, Virginie Chaillou-Atrous, Sylvain Gouguenheim, Georges Bensoussan), de philosophes (Marcel Gauchet, Pierre-André Taguieff), de politistes (Laurent Bouvet, Josepha Laroche), de sociologues (Nathalie Heinich, Stéphane Dorin), d’économistes (Jérôme Maucourant), de géographes et démographes (Michèle Tribalat, Christophe Guilluy), d’écrivains et essayistes (Kamel Daoud, Pascal Bruckner, Mohamed Louizi), ce sont à présent les spécialistes de littérature et de théâtre Alexandre Gefen et Isabelle Barbéris qui font l’objet de cabales visant à les discréditer. Dans le domaine culturel, l’acharnement se reporte sur des artistes parmi les plus reconnus pour les punir d’avoir tenu un discours universaliste critiquant le différentialisme et le racialisme.

La méthode est éprouvée : ces intellectuels « non conformes » sont mis sous surveillance par des ennemis du débat qui guettent le moindre prétexte pour les isoler et les discréditer. Leurs idées sont noyées dans des polémiques diffamatoires, des propos sont sortis de leur contexte, des cibles infamantes (association à l’extrême droite, « phobies » en tout genre) sont collées sur leur dos par voie de pétitions, parfois relayées dans les médias pour dresser leur procès en racisme… Parallèlement au harcèlement sur les réseaux sociaux, utilisés pour diffuser la calomnie, ces « anti-Lumières » encombrent de leurs vindictes les tribunaux de la République.

Nos institutions culturelles, universitaires, scientifiques (sans compter nos collèges et lycées, fortement touchés) sont désormais ciblées par des attaques qui, sous couvert de dénoncer les discriminations d’origine « coloniale », cherchent à miner les principes de liberté d’expression et d’universalité hérités des Lumières. Colloques, expositions, spectacles, films, livres « décoloniaux » réactivant l’idée de « race » ne cessent d’exploiter la culpabilité des uns et d’exacerber le ressentiment des autres, nourrissant les haines interethniques et les divisions. C’est dans cette perspective que s’inscrit la stratégie d’entrisme des militants décolonialistes dans l’enseignement supérieur (universités ; écoles supérieures du professorat et de l’éducation ; écoles nationales de journalisme) et dans la culture.

La situation est alarmante. Le pluralisme intellectuel que les chantres du « décolonialisme » cherchent à neutraliser est une condition essentielle au bon fonctionnement de notre démocratie. De surcroît, l’accueil de cette idéologie à l’université s’est fait au prix d’un renoncement à l’exigence pluriséculaire de qualité qui lui valait son prestige.

Nous appelons les autorités publiques, les responsables d’institutions culturelles, universitaires, scientifiques et de recherche, mais aussi la magistrature, au ressaisissement. Les critères élémentaires de scientificité doivent être respectés. Les débats doivent être contradictoires. Les autorités et les institutions dont ils sont responsables ne doivent plus être utilisées contre la République. Il leur appartient, à tous et à chacun, de faire en sorte que cesse définitivement le détournement indigne des valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité qui fondent notre démocratie."

 

Les signataires

  1. Waleed AL-HUSSEINI, essayiste
  2. Jean-Claude ALLARD, ancien directeur de recherche à l’IRIS
  3. Pierre AVRIL, professeur émérite de l’université Panthéon-Assas
  4. Vida AZIMI, directrice de recherche au CNRS
  5. Elisabeth BADINTER, philosophe
  6. Clément BENECH, romancier
  7. Michel BLAY, historien et philosophe des sciences
  8. Françoise BONARDEL, philosophe
  9. Stéphane BRETON, ethnologue et cinéaste
  10. Virgil BRILL, photographe
  11. Jean-Marie BROHM, sociologue
  12. Sarah CATTAN, journaliste
  13. Philippe de LARA, philosophe
  14. Maxime DECOUT, maître de conférences et essayiste
  15. Bernard de LA VILLARDIERE, journaliste
  16. Jacques de SAINT-VICTOR, professeur des universités et critique littéraire
  17. Aurore DESPRES, maître de conférences
  18. Christophe de VOOGD, historien et essayiste
  19. Philippe d’IRIBARNE, directeur de recherche au CNRS
  20. Arthur DREYFUS, écrivain, enseignant en cinéma
  21. David DUQUESNE, infirmier
  22. Zineb EL RHAZAOUI, journaliste
  23. Patrice FRANCESCHI, aventurier et écrivain
  24. Jean-Louis FABIANI, sociologue
  25. Alain FINKIELKRAUT, philosophe et académicien
  26. Renée FREGOSI, philosophe et politologue
  27. Jasmine GETZ, universitaire
  28. Jacques GILBERT, professeur des universités
  29. Marc GOLDSCHMIT, philosophe
  30. Philippe GUMPLOWICZ, professeur des universités
  31. Claude HABIB, professeure des universités et essayiste
  32. Noémie HALIOUA, journaliste
  33. Marc HERSANT, professeur des universités
  34. Marie IBN ARABI, professeure agrégée de philosophie
  35. Pierre JOURDE, écrivain
  36. Gaston KELMAN, écrivain
  37. Alexandra LAVASTINE, philosophe
  38. Françoise LAVOCAT, professeure de littérature comparée
  39. Barbara LEFEBVRE, enseignante et essayiste
  40. Jean-Pierre LE GOFF, sociologue
  41. Damien LE GUAY, philosophe
  42. Noëlle LENOIR, avocate au barreau de Paris
  43. Anne-Marie LE POURHIET, professeure de droit public
  44. Laurent LOTY, chercheur au CNRS
  45. Catherine LOUVEAU, professeure émérite
  46. Yves MAMOU, journaliste
  47. Laurence MARCHAND-TAILLADE, présidente de forces laïques
  48. Jean-Claude MICHEA, philosophe
  49. Isabelle MITY, professeure agrégée
  50. Yves MICHAUD, philosophe
  51. Franck NEVEU, professeur des universités en linguistique
  52. Pierre NORA, historien et académicien
  53. Fabien OLLIER, directeur des éditions QS ?
  54. Mona OZOUF, historienne et philosophe
  55. Patrick PELLOUX, médecin
  56. René POMMIER, universitaire et essayiste
  57. Céline PINA, essayiste
  58. Monique PLAZA, docteure en psychologie
  59. Michaël PRAZAN, cinéaste, écrivain
  60. Charles RAMOND, professeur des universités et philosophe
  61. Philippe RAYNAUD, professeur des universités et politologue
  62. Dany ROBERT-DUFOUR, professeur des universités, philosophe
  63. Robert REDEKER, philosophe
  64. Anne RICHARDOT, maître de conférences des universités
  65. Pierre RIGOULOT, essayiste
  66. Jean-Pierre SAKOUN, président du Comité Laïcité République
  67. Philippe SAN MARCO, essayiste
  68. Boualem SANSAL, écrivain
  69. Jean-Paul SERMAIN, professeur des universités en littérature française
  70. Dominique SCHNAPPER, politologue
  71. Jean-Eric SCHOETTL, juriste
  72. Patrick SOMMIER, homme de théâtre
  73. Véronique TAQUIN, professeure et écrivaine
  74. Jacques TARNERO, chercheur et essayiste
  75. Carine TREVISAN, professeure des universités en littérature
  76. Michèle TRIBALAT, chercheuse démographe
  77. Caroline VALENTIN, avocate et éditorialiste
  78. André VERSAILLE, écrivain et éditeur
  79. Ibn WARRAQ, écrivain
  80. Aude WEILL RAYNAL, avocate
  81. Yves-Charles ZARKA, professeur des universités en philosophie

__________

  1. Par exemple : Parti des Indigènes de la République, Collectif contre l’islamophobie en France, Marche des femmes pour la dignité, Marches de la dignité, Camp décolonial, Conseil représentatif des associations noires, Conseil représentatif des Français d’outre-mer, Brigade antinégrophobie, Décoloniser les arts, Les Indivisibles (Rokhaya Diallo), Front de mères, collectif MWASI, collectif Non MiXte.s racisé.e.s, Boycott désinvestissement sanctions, Coordination contre le racisme et l’islamophobie, Mamans toutes égales, Cercle des enseignant.e.s laïques, Les Irrécupérables, Réseau classe/genre/race.
  2. Par exemple : Collège de France, Institut d’études politiques, Ecole normale supérieure, CNRS, EHESS, université Paris-VIII Vincennes-Saint-Denis, université Paris-VII Diderot, université Panthéon-Sorbonne Paris-I, université Lumière-Lyon-II, université Toulouse-Jean-Jaurès.
  3. Par exemple : Philharmonie de Paris, Musée du Louvre, Centre dramatique national de Rouen, Mémorial de l’abolition de l’esclavage, Philharmonie de Paris, musée du Louvre, musée national Eugène-Delacroix, scène nationale de l’Aquarium.

 


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