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Les porte-avions chinois
Article mis en ligne le 28 avril 2022
dernière modification le 15 juillet 2023

par Nghia NGUYEN

 

C’est à partir du sistership du porte-aéronefs russe Amiral Kuznetsov - le Varyag - que la Marine de guerre chinoise lançait son premier porte-avions de l’histoire en 2012. Ce sont les chantiers navals de Dalian qui convertirent le Varyag – construit en 1988 et racheté par la Chine en 1998 – en porte-avions de type 001. Le lancement du Liaoning (coque n° 16) fut suivi, en 2019, par le lancement d’un deuxième porte-avions : le Shandong (type 002, coque n° 17). Ces deux bâtiments sont des porte-avions de type STOBAR reconnaissables à leur pont d’envol en tremplin incliné à 14° à la proue. Ils mettent en œuvre une quarantaine d’intercepteurs Shenyang J-15 (Requin volant) dont la conception dérive des Su-33 russes mais avec une motorisation et des systèmes d’armes chinois.

Avec le Liaoning et le Shandong la Marine chinoise apprend à construire mais aussi à utiliser de manière opérationnelle les premiers porte-avions de son histoire. Ces deux bâtiments constituent, à l’heure actuelle, le coeur du noyau aéronaval que Pékin entend développer rapidement dans la perspective d’une confrontation avec les Etats-Unis (1). Parallèlement, on assiste à un ambitieux programme de construction de bâtiments porte-hélicoptères (type 075) – équivalent des bâtiments d’assaut amphibie américains – qui pourraient dans un avenir relativement proche accueillir des avions à décollage vertical. Si le Liaoning a été initialement construit par les chantiers navals russes, le Shandong a été intégralement réalisé par les chantiers de Dalian Shipbuilding Industry Company. Plus long et plus lourd que son prédécesseur (2), il présente des améliorations avec notamment un îlot redessiné sur des lignes furtives.

Films et documentation sur ces premiers porte-avions sont rares tant l’enjeu est stratégique pour la Marine chinoise. Le cinéma de guerre – pourtant attaché à glorifier cette puissance navale et de projection inédite – se fait aussi discret sur la montée de ce qui est d’ores et déjà la deuxième puissance aéronavale de la planète en nombre de bâtiments. C’est donc par le biais de la propagande que Pékin nous fait connaître le lancement imminent de son troisième porte-avions dans une vidéo du People’s Daily online (3) en date du vendredi 22 avril 2022, et à l’occasion du 73e anniversaire de la création de la Marine de guerre chinoise (4). Si la vidéo du PDO nous montre des scènes (rares) tournées à bord des Liaoning et Shandong, l’annonce de l’arrivée d’un troisième enfant au cours d’une conversation téléphonique entre un marin et sa femme est la métaphore qui ne laisse planer aucun doute.

Ce troisième porte-avions (type 003) devrait être un bâtiment plus gros et plus lourd avec 320 m de long et déplaçant 85 000 tpc. Surtout, il serait aux normes CATOBAR au même titre que les porte-avions de l’US Navy et le Charles de Gaulle français. Cette augmentation en gamme est en soi une première. Elle permettrait à la Chine d’accéder au club très restreint des marines actuellement capables de projeter une véritable force aéronavale au coeur des océans et partout dans le monde. Rappelons que le système CATOBAR permet de déployer des avions plus lourds sur un spectre de missions beaucoup plus large. Partant, il définit le standard du porte-avions lourd. Ce troisième porte-avions chinois serait donc capable de lancer des avions de surveillance aérienne ainsi que de nouveaux modèles d’avions de combat.

En attendant de prochaines images de ce nouveau porte-avions, la vidéo du PDO nous montre – sur le registre d’une mise en scène cinématographique – les progrès rapides que réalise l’Aéronavale chinoise : entraînement incessant de ses pilotes, décollages et appontages de nuit, ravitaillement en vol entre J-15… À travers des plans d’efforts physiques et sportifs, c’est la volonté d’une Nation désirant plus que jamais accéder au statut de puissance navale océanique qui transparait. Partant, ce qui frappe surtout c’est la dynamique même de l’émergence de cette puissance navale et aéronavale. Tous les quatre ans, l’APL lance à la mer l’équivalent de notre Marine nationale en nombre de bâtiments. Dans huit ans - en 2030 - elle devrait déployer un quatrième porte-avions opérationnel et, à l’horizon des années 2040/2050, un cinquième à propulsion nucléaire cette fois.

Certes, cet effort industriel et technologique reste quantitatif. Il ne peut se substituer à une capacité qualitative qui serait de pouvoir conduire une véritable guerre aéronavale. Si intenses soient les efforts de l’APL pour se doter de porte-avions et de porte-hélicoptères, ces derniers n’auront jusqu’à présent jamais connu l’épreuve de vérité qu’est la guerre. Les Etats-Unis - dont la Marine est sortie toute armée d’une confrontation aéronavale et amphibie majeure contre le Japon, dont les porte-avions nucléaires sont en opérations permanentes depuis la Guerre froide - gardent un avantage qualitatif tant en termes technologiques que de savoir-faire opérationnels et de doctrine d’emploi. Une course contre la montre est donc engagée dans le Pacifique entre les deux puissances dont la rivalité navale est très certainement l’expression la plus concrète de la guerre qu’elles entrevoient de se livrer dans un avenir plus ou moins proche.

Aucune guerre projetée n’est une certitude mais la confrontation sino-américaine est dans l’ordre des possibles d’ici la fin de ce siècle. Nous y risquerions même l’analyse d’inscrire cette confrontation hypothétique dans l’actuelle guerre entre la Russie et l’Ukraine où la politique de l’administration BIDEN ne cesse de durcir la réponse collective à l’endroit de la Russie. La cobelligérance de fait des Etats-Unis et de certains pays de l’OTAN présente un risque réel d’élargissement de la guerre qui mettrait les États européens en première ligne sans pour autant engager directement Washington (afin d’éviter une escalade nucléaire). Si la perspective du conflit ukrainien est d’emblée mondialisée, une guerre mondiale à l’échelle de l’Europe ne serait ainsi pas forcément une guerre nucléaire. Elle aurait cependant pour bénéfice stratégique d’affaiblir significativement la Russie à un moment où les Etats-Unis se préparent à une autre guerre mondiale dans le Pacifique.

__________

  1. Cf. Le Liaoning est affecté à la base navale de Qingdao et le Shandong à celle de Yulin.
  2. Cf. Le Shandong mesure 315 m de long pour 70 000 tonnes en charge contre 304 m et 65 000 tpc pour le Liaoning.
  3. Cf. « China releases aircraft carrier-themed promotional video hinting arrival or third one », in People’s Daily online, April 22, 2022. Le Quotidien du Peuple en ligne est l’organe de presse du Parti Communiste Chinois (PCC). Lire la vidéo en marge de l’article.
  4. Cf. La Marine de l’Armée Populaire de Libération (APL) a été officiellement créée le 23 avril 1949.

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