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Le PS est mort (depuis 100 ans)

DELBECQUE (Éric), « Le PS est mort (depuis 100 ans) », in Le Huffington Post, 24 janvier 2017.

Article mis en ligne le 28 janvier 2017
dernière modification le 25 octobre 2022

par Nghia NGUYEN

À travers un rappel de ce que fut l’évolution idéologique du PS depuis le XXe siècle, Éric DELBECQUE montre comment la doctrine de ce parti politique - aujourd’hui inspirée du think tank Terra Nova - a affaibli notre Défense.

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Le duel Hamon/Valls ne nous révèle rien de nouveau sur le déclin du socialisme en France. Le PS est mort depuis longtemps, même si son ombre continue à hanter les palais de la République et qu’il semble gouverner... Son agonie a commencé dès le Congrès de Tours en 1920, lorsque Léon Blum empêcha la SFIO de basculer dans le camp du bolchevisme, tout en laissant prospérer au sein de l’appareil cette schizophrénie dangereuse entre un vocabulaire maximaliste révolutionnaire et une pratique réformiste, dont témoigna le Front populaire en 1936. Ce qui conduisit d’ailleurs Blum à des distinctions difficiles à soutenir politiquement entre « l’exercice » et la "conquête" du pouvoir, le premier qualifiant l’arrivée aux affaires en régime capitaliste, et la seconde désignant le moment de la Révolution (c’est-à-dire la rupture avec l’économie libérale et le basculement dans le socialisme authentique).

Guy Mollet persista dans cet inconfort doctrinal, refusant obstinément – à son tour – de réaliser la métamorphose du socialisme hexagonal d’inspiration marxiste pour l’imposer clairement comme un parti social-démocrate (se fixant pour but la réforme progressive des excès du capitalisme, dans un état d’esprit keynésien). L’atlantisme farouche de Mollet acheva de rendre problématique l’identité de la SFIO. Quant à François Mitterrand, il acta ce déchirement interne, mais en usa en virtuose afin de créer le PS du Congrès d’Epinay en 1971, lequel unifia faussement des idées et des hommes qui n’avaient pas grand chose en commun.

En revanche, Mitterrand fit du Parti socialiste une machine efficace, et emporta les élections présidentielles de 1981 en affirmant ce désir de « changer la vie ». Toutefois la pratique du pouvoir fit rapidement exploser l’incohérence existant entre la théorie et la pratique. Le projet européen et la politique économique, après le tournant de la rigueur en 1983, furent une centrifugeuse qui termina de détruire la structure du socialisme et de rallier objectivement les socialistes français au capitalisme à la mode des années 80, sans qu’ils veuillent reconnaître cette dynamique, pourtant évidente.

Il en résulta deux processus qui arrivent à pleine maturité sous le quinquennat de François Hollande. Le premier, c’est la ruine du mythe socialiste de créer une société plus égalitaire et plus juste. Le deuxième, c’est l’impossibilité pour le PS – en regard de la fixation idéologique oedipienne dont il souffre à l’égard du marxisme – de se décomplexer et d’assumer sa mue.

Le chemin d’avenir était de construire l’Etat-stratège, un rêve keynésien par excellence. Il aurait alors été possible de donner un véritable contenu à la social-démocratie ou au social-libéralisme (peu importe le nom que l’on choisisse parmi ces terminologies, toutes extrêmement relatives). Il s’agissait d’organiser un véritable partenariat entre le public et le privé, à travers les grilles de lecture de la géoéconomie, c’est-à-dire du rapport de forces industriel et commercial entre les nations. Dès le milieu des années 80, avant même la chute du monde communiste, la guerre économique structurait déjà l’échiquier de la puissance planétaire, réarticulant le classement des nations. Une mutation d’ailleurs actée par les Etats-Unis, le Japon, puis la Chine.

La définition d’une politique publique d’intelligence économique (c’est-à-dire de compétitivité et de sécurité économique) ne reposant pas sur le dogme simpliste de la désinflation compétitive, de la compression des "coûts salariaux", aurait autorisé les socialistes à entrer de plein pied dans le XXIe siècle. Hélas, à l’exception notable d’Edith Cresson (et plus faiblement de Michel Rocard), ce sujet ne mobilisa personne rue de Solférino. Pour s’y investir sérieusement, Il aurait fallu rompre avec les vieux mythes rigidifiés (le « grand soir », la « collectivisation », etc.). Tous les débats concernant le patriotisme économique, la protection des secteurs stratégiques, le Made in France, la rénovation de la politique industrielle, constituaient le cœur d’un véritable renouveau du socialisme français. Dès le début des années 90, il eût fallu qu’ils occupent le devant de la scène. Aujourd’hui, on constate les dégâts de cette absence de réflexion stratégique. L’Union européenne, construite en bonne partie par les leaders successifs et les ténors du PS (François Mitterrand et Jacques Delors au premier chef), a consacré la victoire du droit de la concurrence et le désarmement des Etats en matière de souveraineté industrielle. Face à la désindustrialisation ou aux délocalisations, face à la perte de contrôle de certains de nos grands groupes et à notre incapacité à épauler le développement de nos PME prometteuses, nous n’avons pas de discours organisé à opposer à la mondialisation sauvage. C’était là la grande œuvre que pouvaient accomplir les socialistes...

En matière de sécurité nationale, le constat est identique. En rejetant le concept de nation au fondement des valeurs républicaines, au profit d’un politiquement correct étouffant censé permettre le remplacement électoral des classes populaires par différentes « minorité » agrégées (qualification d’ailleurs condescendante puisque les Français sont d’abord des citoyens et ne sont pas réductibles à une part de leur identité globale), le socialisme à la mode de Terra Nova a rendu incohérente la politique étrangère de notre pays, et a désarmé notre capacité d’analyse des questions majeures de sécurité qui se posent à nous (du combat contre le salafisme djihadiste à la sécurité économique en passant par la lutte contre la petite délinquance et les « incivilités »).

Au final, que conclure ? Que le PS a tout du célèbre village Potemkine : de luxueuses façades en carton-pâte masquent la pauvreté des édifices et des maisons pour alimenter des illusions et éviter de poser des questions douloureuses. Affronter ces dernières s’affirme néanmoins comme notre seul moyen de sortir de l’ornière. La confrontation de dimanche prochain forme l’aboutissement d’une obstination à nier le réel.

  • Eric Delbecque est directeur du département intelligence stratégique de SIFARIS, Président de l’ACSE. Il a récemment contribué au premier livre du Comité Orwell chez Plon : Bienvenue dans le pire des mondes. Le triomphe du soft totalitarisme, et il est le coauteur, avec Christian Harbulot, de L’impuissance française : une idéologie ? (UPPR)


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