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L’assassinat du Duc de Guise (1588)
Article mis en ligne le 11 décembre 2017
dernière modification le 11 décembre 2022

par Nghia NGUYEN

L’assassinat du Duc de Guise (gravure, XVIe siècle)

 

Religion et politique

La naissance et le développement du Protestantisme secouent l’Europe de spasmes violents, mais c’est au royaume de France où la monarchie capétienne puise directement sa légitimité dans la foi et la religion chrétiennes que les heurts sont particulièrement sanglants. Le XVIe siècle français a connu pas moins de huit « guerres de religion », dont l’expression est encore, de nos jours, utilisée pour désigner communément le fanatisme en matière religieuse.

Vouloir comprendre la violence de l’époque c’est appréhender l’idée d’un pouvoir monarchique intrinsèquement lié à une religion dont la remise en cause n’est pas sans conséquence pour l’ensemble de l’édifice politique. Au-delà des affrontements théologiques, les guerres de religion ont douloureusement posé la question de l’État en France, et ont soulevé des enjeux idéologiques et politiques. Elles ont été une grave période d’affaiblissement de l’État royal, d’autant plus qu’à la guerre civile s’est greffée une guerre étrangère sur de longues années. Les puissances catholiques et protestantes d’Europe ont ainsi joué leur jeu en nouant des alliances avec les partis en présence. Le caractère sacro-saint de la personne royale a également été profondément affecté comme le montrent les assassinats d’Henri III (1589) et d’Henri IV (1610). Le roi peut être désormais qualifié de « tyran » et frappé d’indignité, ce qui ouvre la porte au régicide.

La famille de GUISE, championne de la cause catholique

La famille de GUISE se confond avec la cause du parti catholique ultra, qui dispute le pouvoir royal au parti protestant ou huguenot. Le père d’Henri, François de GUISE (1519-1563), s’était déjà illustré comme chef politique et militaire catholique d’envergure durant la première de religion, avant d’être assassiné par le huguenot Jean de POLTROT de MÉRÉ (1537-1563) en 1563. Succédant à son père, Henri s’affirme rapidement par son ambition politique comme par ses talents militaires sur le champ de bataille. Il participe au massacre des protestants dans Paris lors de la Saint-Barthélémy (24 août 1572), et continue de guerroyer contre les troupes huguenotes à travers le royaume. En 1575, il est blessé au visage par un tir d’arquebuse et reçoit dès lors le surnom de « Balafré ».

La politique du Duc de GUISE se retourne contre le roi de France à partir de 1584, lorsque Henri III – privé d’héritiers directs (1) – désigne Henri de Navarre (2) comme son successeur. Ce dernier issu de la maison de Bourbon - un lignage rival de la maison de Lorraine - est par ailleurs protestant. Un puissant mouvement d’opposition à la fois religieux et politique va alors se nouer autour d’Henri de GUISE : c’est la Ligue dite aussi Sainte Ligue ou Sainte Union. La Ligue menace directement le pouvoir monarchique : la ville de Paris lui est acquise, les ralliements sont nombreux, qui contestent ouvertement la politique et les conseillers du roi. Alors qu’Henri III ne parvient pas à en prendre le contrôle, les combats entre catholiques et protestants ont repris et font rage dans le cadre de la huitième guerre de religion.

C’est alors que le Roi décide de faire assassiner son puissant rival lors des états généraux convoqués à Blois en octobre 1588. Le projet d’assassinat concerne également le frère d’Henri de GUISE, le Cardinal de Lorraine Louis de GUISE (1555-1588) l’autre grand chef de la Sainte Ligue. Attirés au château de Blois, les deux frères ne se doutent de rien. Henri de GUISE est même persuadé que le rapport de force poussera Henri III à lui reconnaître une position incontournable au coeur du pouvoir. Cependant, alors qu’il devait rencontrer le Roi ce 23 décembre 1588, Henri de GUISE est piégé dans une chambre du château par les gardes du corps d’Henri III : les Quarante-Cinq. À huit contre un, ces derniers le mettent à mort et arrêtent son frère qui est exécuté le lendemain. Les corps sont brûlés et les cendres dispersées.

Avec l’assassinat des frères de GUISE, Henri III pensait avoir décapité l’opposition catholique. Il ne fit que la renforcer. Désormais les ligueurs se soulèvent dans tout le royaume. Henri III est, par ailleurs, excommunié par le Pape Sixte Quint pour l’assassinat prémédité d’un homme d’Église. La Sorbonne délie les sujets de leur devoir de fidélité envers un souverain qualifié de « tyran », et des appels au tyrannicide sont lancés. C’est la porte ouverte au régicide. Pour sauver la monarchie, le Roi n’a d’autre choix que de s’allier à Henri de Navarre et aux protestants, mais il est lui-même assassiné sept mois plus tard, le 1er août 1589, par le moine Jacques CLÉMENT (1567-1589).

 

  1. Cf. Le roi n’a pas d’enfant et son frère cadet, François Duc d’Anjou, meurt prématurément en 1584 sans héritier mâle.
  2. Cf. Henri de Navarre est le futur Henri IV.

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Bibliographie

  • CONSTANT (Jean-Marie), La Ligue, Fayard, 1996, 530 p.
  • LE ROUX (Nicolas), Les guerres de religion, PUF, 2016, 128 p.
  • LE ROUX (Nicolas), Les guerres de religion 1559-1629, Belin, 2014, 607 p.
  • de PALMAERT (Albéric), Les guerres de religion, Ouest-France, 2017, 128 p.
  • PIGAILLEM (Henri), Les Guises, Pygmalion, 2012, 517 p.

 


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