Accueil à l’ENSIP
Le mardi 5 mars 2019 se tenait à l’École Nationale Supérieure d’Ingénieurs de Poitiers (ENSIP) la Journée académique de cohésion nationale sur l’engagement organisée par le trinôme académique de Poitiers.
Accueillant des délégations de collèges et de lycées venues des quatre départements de l’académie (1), cette manifestation avait pour objectif de faire réfléchir les élèves sur la notion d’engagement. Cette dernière devant d’abord être incarnée à l’échelle de leur établissement scolaire, avant d’être transposée à l’échelle de la Nation. Afin de nourrir une telle démarche, la journée fut organisée autour de cinq ateliers destinés à mettre en contact collégiens et lycéens avec des acteurs engagés dans des domaines aussi différents que la Défense, la sécurité, la Politique, le sport et les instances lycéennes.
Animée par Brigitte ESTEVE-BELLEBEAU, IA-IPR, une table ronde présenta quatre exemples d’engagement devant toucher les jeunes à titre d’exemples. Selon des trajectoires bien différentes, Thomas, Vanessa, Circée et Loys témoignèrent des engagements qu’ils vivaient. Pour Thomas c’était dans l’association sportive de son lycée. Pour Vanessa c’était une démarche plus difficile, liée d’abord à une situation de harcèlement qui l’amena à venir se dépasser au sein des Cadets de la Défense (cf. infra). Elle y trouva une fraternité et une deuxième famille. C’est cependant Circée, âgée de 22 ans, qui illustra un engagement arrivé à maturité. Engagée dans une préparation militaire Marine, la jeune femme a ainsi laissé entrevoir une claire compréhension des valeurs portées dans la notion d’engagement. Tous les quatre ont cependant exprimé à leur façon des idées communes et fortes à l’endroit de leur démarche : le sentiment de se sentir utile, créer des liens, se sentir solidaire… Une démarche qui leur a apportée une plus grande confiance personnelle, un gain de maturité et une discipline structurante.
Thomas, Vanessa, Circée et Loys
Demi-mesure ou échec ?
Au-delà de la qualité de témoignages devant inspirer les collégiens et les lycéens présents - chargés à leur tour de réfléchir à un projet d’engagement au sein de leur établissement scolaire -, il est à regretter que cette journée brouilla la notion d’engagement dans une juxtaposition de problématiques dont certaines relevaient davantage de la confusion des genres que d’un engagement véritable. Peut-on ainsi mettre sur le même plan – comme cela a été présenté dans l’atelier « Politique et engagement » - l’impératif de sûreté publique face au terrorisme et le débat sur l’éclairage des city stades ?
Si, bien évidemment, la valeur de l’engagement peut revêtir des formes multiples, il pourra être reproché à l’organisation de cette journée académique de n’avoir pas davantage insisté sur la dialectique des devoirs et des droits (les premiers commandant les seconds), sur le nécessaire effort qui accompagne tout engagement, voire la notion de sacrifice qui – seule – permet de distinguer des causes d’une Cause. Ainsi, dans le large éventail des possibilités d’engagement présentées, il y en avait bien plus pour une multitude d’engagements - souvent déclinés selon les modes du temps : développement durable, lutte contre les discriminations et le harcèlement, action humanitaire, associations sportives… – que pour un Engagement au sens fort (Politique et Défense).
Car ce qui fonde l’Engagement véritable, c’est avant tout la capacité à comprendre ce qui nous dépasse en tant qu’individu. Une façon de transcendance qui pousse à un sacrifice réel (en temps, en travail, en effort voire en don de sa propre personne) et qui, partant, fait naître une authentique volonté d’agir. Le trinôme académique, grand organisateur de cette manifestation, aurait pu trouver l’occasion de donner une substance à cette culture de défense qui manque tant à l’École, mais Henri SCIARA, membre du conseil d’administration de l’Union-IHEDN et de l’association régionale 18 Poitou-Charentes, prononça un discours qui fut davantage une présentation de l’IHEDN dont on peut se demander comment elle fut reçue par des collégiens et des lycéens. Davantage approfondie, fut l’intervention du Général Pierre SCHILL, commandant la 9e Brigade d’Infanterie de Marine de Poitiers et à ce titre représentant la partie militaire du trinôme, qui développa les notions de « sacrifice » et de « Bien commun ».
La Journée académique de cohésion nationale sur l’engagement n’est pas à remettre en cause. Du moins a-t-elle le mérite d’exister dans le contexte politique et social actuel. La grandiloquence de son intitulé indique cependant en creux l’échec de la cohésion nationale et de ce qui pouvait fonder – il fut un temps – la noblesse de tout engagement. Si cela n’était le cas, ce genre d’initiative ne s’imposerait pas en soi ni ne mobiliserait le Recteur en personne. L’échec de nos institutions à donner du sens à la grandeur de la Politique, à intégrer (à défaut de pouvoir véritablement assimiler), à créer du lien autour de valeurs réellement partagées, ne pouvait mieux être reconnue que dans le principe même de cette journée académique. Épiphénomène d’un mal plus grand, celle-ci paraîtra dans le meilleur des cas bien dérisoire devant la question de la réversibilité des évolutions individualiste et communautariste au sein de notre société (2).
Le Général de brigade Pierre SCHILL
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Les Cadets de la Défense
Les Cadets de la Défense désignent un dispositif créé en 2008, suivi par la Commission Armées-Jeunesse (CAJ) en partenariat avec l’Éducation nationale, et inscrit dans un programme ministériel plus vaste dit « Égalité des chances ». Ce dispositif encadre durant une année scolaire des jeunes de 14 à 16 ans. Ces derniers, tous volontaires, reçoivent une formation sur une demi-journée par semaine dans un environnement militaire. L’objectif est de récupérer certains jeunes en difficulté en les mettant au contact de valeurs structurantes sans pour autant les faire entrer dans la finalité du métier des armes.
La formation ne comporte pas d’exercices militaires en tant que tels : maniement des armes, apprentissages tactiques... En revanche, les élèves sont invités à acquérir un savoir-être au travers d’une expérience de vie en collectivité, le port d’un uniforme, une pratique sportive poussée, l’ordre serré. Environ 400 cadets sont, actuellement, accueillis dans 14 centres dont on pourra regretter qu’ils ne couvrent pas l’ensemble du territoire tant le dispositif semble donner satisfaction en permettant à beaucoup une première insertion professionnelle, la réintroduction d’une discipline civique voire d’une resocialisation à l’endroit où l’École était en échec.
À l’occasion de la Journée académique de la cohésion nationale sur l’engagement, les Cadets de la Défense étaient représentés par le Major (R) Guy M. et son élève Vanessa. C’est à l’ENSOA de Saint-Maixent, qui a déjà accueilli 11 promotions de cadets, que le Major M. travaille, mettant en pratique une pédagogie rigoureuse dont il a lui-même pensé le programme. Dépendant directement du général commandant l’ENSOA, il ne recrute que sur le département des Deux-Sèvres, et témoigne d’un solide savoir-faire dans la prise en main de jeunes en difficulté. S’appuyant sur une longue expérience de sous-officier dans l’Armée de Terre, le Major M. illustre ce que la « militarité » peut aujourd’hui apporter à une jeunesse en perte de sens et de repères. À ce titre, son expertise est sollicitée au plus haut niveau dans la perspective prochaine de la mise en place du Service national Universel (SNU).