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Les trois âges de l’islamo-gauchisme

FERRY (Luc), « Les trois âges de l’islamo-gauchisme », in Le Figaro, 3 mars 2021.

Article mis en ligne le 4 mars 2021
dernière modification le 21 mai 2023

par Nghia NGUYEN

L’alliance idéologique plus ou moins tacite entre une partie de la gauche et l’islamisme, ainsi que la volonté d’instrumentalisation de l’Islam par l’extrême gauche sont des réalités dont la dénonciation relève aujourd’hui d’un fait politique patent non d’une opinion. Dans une chronique aussi claire que pédagogique, le philosophe Luc FERRY retrace la généalogie de l’islamo-gauchisme de Jean-Paul SARTRE jusqu’à ses tenants contemporains, montrant également sa collusion de plus en plus nette avec la cancel culture.

 

Antoine PETIT est le PDG du CNRS depuis 2018. Mathématicien, il est connu pour son engagement partisan et la caution scientifique qu’il cherche à apporter au mouvement décolonial

 

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Le concept a été élaboré, au début des années 2000, par le philosophe et historien des idées Pierre-André Taguieff. C’est fort à juste titre que Mme Vidal a lancé le pavé dans la mare en déclarant que l’islamo-gauchisme « gangrenait » l’université. Encore faut-il, pour comprendre vraiment ce concept, se plonger un instant dans l’étrange histoire intellectuelle de l’extrême gauche.

Alors que dans les années 1970, elle annonce joyeusement la « mort de Dieu », dénonce les méfaits des religions, « opium du peuple » selon Marx, « nihilisme achevé » aux yeux de Nietzsche ou « névrose obsessionnelle de l’humanité » pour Freud, elle devient aujourd’hui le principal allié de l’islamisme. C’est ce renversement inouï de perspective que Pierre-André Taguieff a pointé en élaborant, au début des années 2000, le concept d’islamo-gauchisme. Reste que cette notion avait déjà une préhistoire, et faute de la retracer soigneusement, il est difficile d’en comprendre à la fois la puissance et la nocivité de ce qu’elle désigne.

Tout commence en effet dès la fin des années 1970 lorsque Sartre clame haut et fort son soutien à la révolution iranienne, amorçant ainsi le futur remplacement du prolétariat comme force révolutionnaire par ce « damné de la terre » qu’est selon lui l’islamiste. Sartre n’hésite pas à faire de Khomeyni le « symbole du progrès » (sic !) en tant qu’héritier des « mouvements révolutionnaires d’Algérie et du Cambodge » (re-sic !), le renversement du Chah signant forcément l’émergence d’un régime de liberté puisque anti-américain et anti-impérialiste. Une délégation d’intellectuels se rendra bientôt avec lui en pèlerinage à Neauphle-le-Château afin de saluer le « Soleil de la Révolution ».

Pour ne pas être en reste, Foucault s’empresse de déclarer dans une série d’articles que la révolution islamique est « la forme la plus moderne de la révolte… » Ben voyons ! Quelle lucidité ! Un an plus tard, toujours aussi myope, aveuglé par sa haine de l’Occident, Foucault persiste et signe : « L’histoire vient de poser au bas de la page le sceau rouge qui authentifie la révolution », un moment magnifique conduit par ces héros qui cherchent « au prix même de leur vie cette chose dont nous avons, nous autres, oublié la possibilité depuis la Renaissance : une spiritualité politique. J’entends déjà les Français qui rient, mais je sais qu’ils ont tort ». En effet, ils auraient bien tort de rire, l’horreur qui se profile à l’horizon n’ayant rien de comique, mais pour Foucault comme pour Sartre, il suffit qu’un mouvement soit anti-occidental pour être forcément admirable.

Le deuxième moment dans l’histoire de l’islamo-gauchisme est celui de l’intifada des années 2000 que Taguieff analyse avec rigueur et profondeur. Elle signe clairement l’alliance de l’extrême gauche pro-palestinienne avec ce nouveau nom de l’antisémitisme qu’est l’antisionisme.

C’est seulement dans un troisième temps que l’immigré, de préférence islamiste, va renforcer encore ses positions au détriment du prolétariat comme seule véritable force révolutionnaire, l’extrême gauche forgeant alors le sinistre concept « d’islamophobie », une machine de guerre ayant pour unique finalité de disqualifier comme « raciste » toute critique du fondamentalisme. Il faut citer ici Antoine Petit, le PDG du CNRS, qui déclare sans rire dans la préface (rédigée comme il se doit en écriture inclusive…) d’un livre consacré au mouvement décolonial : « La race devient la nouvelle grille de lecture du monde sur laquelle s’intègre la grille du genre. Dans une société non métissée, le social et le genre dominent, mais dans l’espace interracial, le social s’efface derrière la race. »

On croit rêver ! La race, un mot naguère encore honni à gauche comme appartenant au vocabulaire de l’extrême droite, est réhabilitée pour remplacer la classe, la gauche de la gauche abandonnant alors le social pour le « sociétal », pour ces « studies » (« gender studies », « women studies », « decolonial studies… ») directement empruntées au politiquement correct américain le plus niais et liberticide.

Tout dernièrement, des sondages dévoilaient que si 15% des ouvriers soutenaient Mélenchon, 45% voteraient Le Pen. Plus rien ne s’oppose donc à ce que le « racisé » prenne définitivement la place d’un prolétariat dont l’extrême gauche pense qu’il s’est décidément trop embourgeoisé pour être encore révolutionnaire. Depuis, l’islamo-gauchisme ne cesse de gagner du terrain en s’alliant à l’écoféminisme et au mouvement décolonial pour former cette fameuse « cancel culture woke » qui met peu à peu en place à l’université la chape de plomb d’une véritable police de la pensée.

Luc Ferry

 

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