La musique militaire russe reste peu connue au-delà du très célèbre hymne national composé par Alexandr Vassilievitch ALEXANDROV (1883-1956), et des célèbres Chœurs de l’Armée rouge organisés dès la fin des années 1920. L’ensemble laisse ainsi penser que c’est avec la Russie bolchevique et l’URSS qu’une véritable musique militaire et patriotique est née. Ce serait ainsi ignorer un riche répertoire, fondé sous la Russie tsariste et qui - dès les XVIIe et XVIIIe siècle - donne à cet immense empire une vraie tradition musicale en la matière.
On essayera d’en donner un aperçu à travers les marches régimentaires ci-dessous dont mélodies, harmonies et instrumentalisation rappelleront la musique militaire prussienne. La marche du Régiment de Saint-Petersbourg n’est, d’ailleurs, rien d’autre que le « Preussen präsentiermarsch ». Cette proximité musicale (et culturelle), témoin historique d’élites russes qui cherchaient à s’ancrer dans l’Europe des Lumières, nous montre combien la Russie est aussi dans l’Europe.
Cet héritage a été incontestablement enrichi par la période soviétique, qui en a renforcé les accents idéologiques et patriotiques. « La Guerre sacrée » et l’hymne national figurent parmi les plus beaux exemples de ce renouveau musical. Écrit en remplacement de l’ « Internationale » par ALEXANDROV en 1944, mis en parole par Sergueï Vladimirovitch MIKHALKOV (1913-2009), l’Hymne national soviétique fut remplacé par la « Chanson patriotique » de Mikhaïl Ivanovitch GLINKA (1804-1857) comme nouvel hymne à partir de 1990. La fin de la Guerre froide et les profondes recompositions géopolitiques que connaît alors la nouvelle Russie expliquèrent ce changement. Cependant le peu de succès rencontré par la musique de GLINKA, et son manque d’entrain, poussèrent Vladimir Vladimirovitch POUTINE (1952-) à réinstituer l’hymne d’ALEXANDROV avec de nouvelles paroles cette fois. C’est donc une mélodie particulièrement majestueuse et solennelle, propre à susciter une émotion patriotique réelle, qu’une Russie en quête de puissance a remis à l’ordre du jour.