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Faire la guerre : la MEDOT
Article mis en ligne le 10 mai 2024
dernière modification le 17 mai 2024

par Nghia NGUYEN

Chefs de section durant l’exercice Bold Dragon 2022 (source - Armée de Terre) et officiers à l’entraînement dans un PC (source - École de Guerre-Terre)

 

La guerre demeure une réalité anthropologique dont la dimension collective et organisée étendue à une population, la distingue des autres formes de violence à l’exception de celle des gangs notamment ceux liés au narco-trafic. Or, contrairement à ce que beaucoup pensent, faire la guerre est une chose particulièrement complexe qui ne peut se réduire à appuyer sur des boutons ou des queues de détente. Outil guerrier par définition, les armées, lorsqu’elles entrent en action, engagent des dizaines voires des centaines de milliers d’hommes équipés de matériels très différents dans des milieux tout aussi différents.

Comment commander de telles masses ? Comment comprendre une situation souvent dans l’urgence et dans un temps toujours limité ? Comment construire une décision opérationnelle en conséquence ? Est-ce que celle-ci sera la même à l’échelle d’une section qu’à l’échelle d’une brigade ? C’est à ces questions posées de manière simple mais qui renvoient à des réalités complexes que l’Armée de Terre propose une Méthode d’Élaboration d’une Décision Opérationnelle Tactique (MEDOT).

Anciennement appelée Méthode de Raisonnement Tactique (MRT), la MEDOT est l’adaptation de celle-ci à la guerre contemporaine dans le multi milieux-multi champs (M2MC). La MEDOT est une procédure qui permet à tous les échelons du commandement la mise en place d’un processus décisionnel. Adaptée selon les niveaux hiérarchiques et de responsabilité, elle est comme son nom l’indique une méthode de prise de décision tactique aussi bien au niveau d’une unité élémentaire qu’à un niveau plus élevé où elle devient alors un outil d’état-major. À ce stade, elle sera cependant davantage définie comme opérative que tactique.

La MEDOT est spécifique à l’Armée de Terre car c’est cette dernière qui met en œuvre les plus grandes masses sur un terrain physique qu’il faut tenir mètre par mètre. La Marine et l’Armée de l’Air et de l’Espace font la guerre dans des milieux de nature différente, dont les contraintes et les embarquements physiques ne sont pas du tout les mêmes. Sans être un carcan intellectuel sclérosant, la MEDOT pose d’emblée des questions simples et logiques par rapport aux réalités du terrain : de quoi s’agit-il ? Quoi et pourquoi ? Où ? Contre qui ? Quand ? Comment ? Sur le mode d’une articulation analyse/synthèse/action, elle se présente comme une procédure devant aider un chef à aborder l’ensemble des aspects d’une situation qui, souvent, est traversée d’incertitudes et d’informations partielles si ce n’est biaisée (le « brouillard de la guerre »).

Si, comme pour beaucoup de choses, les choses en l’état sont simples à comprendre d’un point de vue théorique, le passage à la pratique relève d’une autre complexité du fait de l’application de la MEDOT à des niveaux d’emploi d’unités à des échelles qui peuvent être très différentes.

  1. Le premier niveau de mise en œuvre d’une décision tactique sera ainsi la section ou le peloton. Niveau de responsabilité d’un lieutenant ou d’un sous-officier supérieur, il concernera quelques dizaines d’hommes.
  2. Le deuxième niveau sera celui de la compagnie, de l’escadron ou de la batterie. C’est le niveau de l’unité dite « élémentaire », du ressort d’un capitaine. L’unité élémentaire rassemble grosso modo une centaine d’hommes.
  3. Le troisième niveau est celui du régiment. Commandé par un colonel, il concerne un millier d’hommes. Au niveau régimentaire la MEDOT ne se conçoit plus seul et le colonel s’appuie sur un poste de commandement (PC).
  4. Le quatrième niveau est celui de la brigade (7 à 8000 hommes). À partir de ce niveau apparaissent les officiers généraux assistés par un état-major (EM) divisé en différents bureaux.
  5. Le cinquième niveau est celui de la division (30 à 35 000 hommes équivalent à 4 brigades).
  6. Le sixième niveau est celui du corps d’armée (50 à 70 000 hommes).

À partir du PC et des EM la MEDOT doit composer avec un champ de bataille qui se dilate, et où doivent être prises en compte toutes les composantes de l’affrontement y compris, de nos jours, l’action informationnelle. Centralisatrice et verticale, la MEDOT vise à ce que les échelons inférieurs comprennent correctement le sens de l’action sans pour autant étouffer l’initiative au sein de situations aujourd’hui particulièrement « fluides ». Reposant sur la confiance faite aux subordonnés, elle est une boussole tactique permettant de faire comprendre les intentions du chef et du commandement.

La MEDOT est ainsi enseignée dès l’École Spéciale Militaire de Saint-Cyr au niveau section/compagnie. S’adressant à de futurs lieutenant et capitaines, la formation à la MEDOT se poursuit ensuite tout au long de la carrière de l’officier : à la sortie de son temps de commandement en unité élémentaire afin de le préparer au travail en PC ; puis à l’École de Guerre où il entre dans le monde des EM. Formation permanente et continue, occupant 15% du temps de la carrière d’un officier, la MEDOT est, en fait, une matrice intellectuelle devant permettre à ce que tout le monde réfléchisse tactiquement et techniquement de la même manière. Tout général ayant été un lieutenant, un capitaine, un commandant et un colonel ; et tout major ayant été un sergent et un adjudant, la MEDOT - plus qu’un cadre procédurier - s’enrichira d’une expérience unique au fil d’une carrière. À l’heure actuelle, compte tenu de l’évolution des technologies qui permet une augmentation exponentielle de la masse des données sur et au-delà du champ de bataille, les réflexions se tournent vers l’introduction de l’IA dans la MEDOT.

 

Élaborer une décision opérationnelle (source - Conflits le Podcast)

Dans cet entretien réalisé par Jean-Baptiste NOÉ le mardi 16 avril 2024, le colonel Rémi et le chef de bataillon Joran expliquent la MEDOT

 

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