Qu’est-ce que l’Arme du Génie et quelle est son importance sur le champ de bataille terrestre ? Xavier TYTELMAN du magazine Air & Cosmos interroge le Colonel François PERRIER, directeur général de la formation à l’École du Génie et ancien chef de corps du 1er Régiment Étranger de Génie (1er REG).
Chargé de l’appui à la mobilité (franchissement des obstacles, des cours d’eau, contre-minage…), de l’appui à la contre-mobilité (mise en place de systèmes de défense, minage de zones…), de l’appui au déploiement (établissement des axes de communication, protection des postes de commandement et des implantations…), le Génie dont les soldats sont appelés des sapeurs représente, aujourd’hui, 20% de l’Armée de Terre. C’est une Arme indispensable que l’on retrouve dans les trois dimensions du champ de bataille terrestre :
Surtout, les sapeurs du Génie sont partout où il faut manipuler des explosifs. Cette omniprésence à l’arrière comme à l’avant et dans la profondeur les place devant des problématiques paradoxales : construire et détruire ; favoriser et entraver les mouvements. L’Arme requiert de nombreux savoir-faire techniques et l’École d’Angers accueille chaque année 3800 stagiaires toutes armes et armées confondues dans 80 formations différentes.
Avec la guerre en Ukraine, les spécialistes du génie militaire français étudient à nouveau les invariants de la guerre de haute intensité dans un pays plat, bocager où les cours d’eau sont perpendiculaires aux axes de progression offensifs et où la rareté du réseau routier empêche la logistique opérationnelle de se déployer facilement.
Présentant des analogies avec la guerre de tranchées de la Première Guerre mondiale et la bataille du bocage normand de la Deuxième, l’actuelle zone des combats au sud du Donbass réaffirme l’importance du génie combat. Sur un espace de 20 à 30 km de profondeur, les forces russes ont établi trois lignes de défense traversées d’innombrables obstacles de cloisonnement. Cette défense par couches successives peut se résumer en :
Minage, piégage et bréchage sont donc au coeur de combats dont la progression reste lente et meurtrière, mais les armées apprennent vite. Les Ukrainiens excellent ainsi dans l’élaboration de complexes tactiques canalisant les forces russes dans des champs de mines (kill boxes). Inversement, l’Armée russe a réalisé le tour de force de faire franchir le Dniepr en 48.00 à 4 brigades et 1000 véhicules lors de son évacuation de Kherson.